Depuis ses Massacres dont
j’ai pu saluer à leur sortie la « salubre » nécessité, pensant
premièrement à ces enseignants qui, à la manière de ce personnage de Ferdydurke
pleurant sur l’insensibilité de ses élèves, s’échinent toujours à faire
d’autorité admirer en classe, des textes auxquels eux-mêmes restent
parfaitement extérieurs pour ne pas dire étrangers, Typhaine Garnier semble
avoir résolument engagé sa carrière littéraire sur le chemin du burlesque. On
sait ce genre par les classiques méprisé car relevant d’une forme d’esprit
visant à avilir plutôt qu’à l’ennoblir, notre humaine condition. Sainte-Beuve y
voyait toutefois un heureux antidote aux boursouflures et aux excessives
préciosités d’une littérature imbue de son importance. Pour ce qui est de
Typhaine Garnier il semble bien que le style burlesque soit de façon plus
générale encore, la meilleure façon de mettre à mal tout ce fourbis, cet
attirail, ce grand capharnaüm de représentations plus ou moins convenues qui encombrent,
de la naissance à la mort, nos imaginations et s’accordent au final à nous bourrer
le mou.
Conçu à la façon d’une
succession de petites annonces, type pourquoi pas bon coin, aspirant à débarrasser
leurs propriétaires de toutes sortes d’objets de seconde ou de nième
main, tout en faisant au chaland miroiter leur éminente valeur, l’ouvrage
entreprend de liquider comme l’indique clairement la quatrième de
couverture, l’ensemble des souvenirs
qui composent une vie : motifs de l’enfance, choses du cœur et déboires
du corps … à quoi s’ajoutent aussi bien les tristes perspectives de l’âge
et d’une mort vite expédiée, sans oublier le ridicule commerce des vaines
gloires rancies célébrant à l’envie leur Chant sot.
Cela, on le verra, compose un
livre terriblement réjouissant. Tant comme objet de langue que plus
philosophiquement comme puissant remède aux marchandes idéalités du temps par
quoi nos vies se voient de jour en jour artificialisées. Et cyniquement
conduites à se désespérer. Dans un article de Sitaudis, François Huglo
présente avec brio l’ouvrage, insistant en particulier sur sa proximité avec
l’esprit animant le Rimbaud des Petites amoureuses voire des Accroupissements.
Dans sa façon de s’en prendre à ce bon vieux sentimentalisme dégoulinant qui
fait de tout niaiseries. J’engage ici mon lecteur à prendre connaissance de cet article qui rend ce Vide-grenier vraiment des plus désirables. Oui.
Quand par exemple on voit ces beaux esprits diplômés, posant de surcroît à
l’artiste, se pâmer devant les piteuses compositions qu’ils nous offrent en
partage, comment ne pas se régaler de la prose inclémente mais si diablement inventive
et intelligente de Typhaine Garnier tournant en dérision la visite de la « noble
bâtisse » au fronton de laquelle fulgure en lettres capitales et
dorées l’engageante inscription : CI-VIT / LE PLUS GRAND POÈTE
/ DE SA GÉNÉRATION !!!
Pour nous délivrer des postures.
Des impostures. Dans l’attente du final compostage qui nous attend à Plurien
(Côtes-d’Armor) ou à Hébécrevon (Manche) à moins que ce ne soit pour le
fun à Moncrabeau
(Gers), capitale avouée des Menteurs où nous aussi, avons déjà nos
habitudes.