C’est une image un peu à la Degottex, celui d’après 1955, qui déchire et entaille, qui fait la couverture du dernier livre de Laure Gauthier, les corps caverneux, aux éditions LansKine. Cette image due à Christophe Lalanne, dont j’ai découvert à l’occasion l’intéressant travail[1], peut effectivement être une bonne entrée à ce livre qui n’a de cesse de mettre à jour ce qui se joue sous les surfaces. Que ce soit très prosaïquement celles que nous appelons grandes, les commerciales, ou plus spécifiquement celles que constituent pour les mots, les pages où nous les dessinons. Sans négliger bien sûr la peau. Cette peau qui nous fait enveloppe. Mais par où passent d’infinis et mystérieux échanges. La sensation même de la vie.
Parler de surface, de surfaces plutôt, quand il est question de cavernes, n’a rien de contradictoire. Nous imaginons beaucoup trop les surfaces à partir de notre notion du plat. Alors qu’elles se replient, se ploient, se creusent, se retournent, se tordent, se déploient. Et c’est le mérite du travail de Laure Gauthier que de se montrer attentive à l’ensemble des énergies par quoi tout cela forme espace. Aussi bien d’enfermement. Que de liberté.
Précisons. L’être humain pour Laure Gauthier est un être essentiellement caverneux. C’est-à-dire qu’il est d’abord le lieu d’un brassage incessant d’énergies, de fluides, qui fait qu’à l’image de la verge passant de tendue à flaccide et inversement, le vide, les vides dont nous nous trouvons constitués, sont en permanence traversés, conduisant notre relation au monde, à l’être, à osciller entre plénitude et manque, ce manque surtout, ce trou, que nous aspirons à voir le plus souvent combler, par quelque chose de vivant, de vaste ou de puissant, à l’intérieur de nous.