mardi 30 mars 2021

MADELEINE BERNARD. ÊTRE SŒUR D’UN GRAND PEINTRE À L’ÉPOQUE DE VAN GOGH ET GAUGUIN. SUR UN OUVRAGE DE MARIE-HÉLÈNE PROUTEAU.

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Son frère n’a que 20 ans quand il la peint grandeur nature allongée sur l’herbe fleurie qui borde la rivière Aven coulant en arrière plan entre les arbres un peu grèles du petit Bois d’Amour. Madeleine, elle, a 17 ans. Et dans sa posture étudiée de gisante qui la fait un peu ressembler par la proximité de l’eau à la célèbre composition de John Everett Millais représentant la mort d’Ophélie, qu’on peut voir à la Tate Britain de Londres, elle aussi semble flotter sur la toile rêveuse, être comme aspirée, soulevée par quelque charme indéfinissable. Le charme ici peut-être d’un moment de bonheur ressenti, d’équilibre capté entre les âmes et les choses, qu’à jamais le tableau aura retenu pour nous, dans ses verts, ses bleus, ses roses, son ocre, les noirs aussi des troncs qui ne font plus barrière mais entrainent le regard vers les reflets dans l’eau, d’un ciel mouvant d’été.

 

L’histoire aura bien retenu que cette Madeleine peinte ici par Émile Bernard aura en cette année 1888 attiré dans le gros bourg de Pont-Aven où s’est depuis quelque temps établi une solide colonie de peintres, l’attention de Gauguin. Au point de se voir par lui attribuer, pour rire, un petit tableau connu sous le nom de Fête Gloanec, actuellement au Musée des Beaux Arts d’Orléans. Avant qu’au verso d’une œuvre intitulée La Rivière Blanche, il ne réalise d’elle un magnifique portrait que détient le musée de Grenoble. Mais l’histoire n’est guère prodigue sur le destin relativement exceptionnel de cette femme qui fut aussi un moment comme fiancée au peintre Charles Laval, artiste à mon sens injustement éclipsé par la notoriété de l’auteur du fameux Christ jaune, qui partagea avec lui un atelier à la Martinique et signa même de son nom des toiles qui lui sont aujourd’hui réattribuées.

jeudi 25 mars 2021

P’TIT BONHOMME DE CHEMIN, UN LIVRE DE FLORENCE TROCMÉ.

Chanter dans son arbre généalogique, cette recommandation de Cocteau dans son livre de 1922, Le Secret professionnel adressé aux étudiants des Belles-Lettres de Genève et de Lausanne en témoignage de reconnaissance[1], est une belle et bonne chose. Même si cet arbre comme tout arbre qui n’est pas l’arbre en pied qui occupe depuis toujours le fond de votre jardin, n’est pas toujours simple à se représenter. Fondatrice, animatrice d’une revue numérique puissante dont le travail d’analyse, de partage, comme de prospection et de légitimation de toute une partie de la création poétique contemporaine, assurément pas la plus mauvaise, est largement reconnu, Florence Trocmé est de ces personnes qui trouvent sens et dignité à accompagner avec intelligence et sensibilité l’œuvre des autres.  Et c’est forte encore de ces dispositions qu’elle fait paraître aujourd’hui ce P’tit Bonhomme de chemin, ouvrage au second degré sans doute, qui entreprend « de redonner vie [à un récit presque totalement oublié de Jules Verne évoquant le périple d’un orphelin d’Irlande] en en réécrivant l’histoire en vers justifiés et en croisant ce poème avec d’autres voix, l’une plus documentaire sur l’Irlande, la famine[2], une autre litanique avec les noms de lieux ou toutes les occurrences de certains mots clés » sans oublier la sienne propre.

 

mardi 23 mars 2021

CONTINUER. SUR LE DERNIER LIVRE DE STÉPHANE BOUQUET, LE FAIT DE VIVRE CHEZ CHAMP VALLON.

Il me semble avoir déjà beaucoup écrit sur les diverses publications de Stéphane Bouquet. Mais précisément, Stéphane Bouquet est de ces poètes qu’on ne se lasse pas de suivre. D’accompagner. D’avoir envie, même s’il est bien sûr loin d’être ignoré du petit milieu qui s’intéresse vraiment à la poésie, de faire toujours davantage connaître et apprécier.

Les titres de ses livres d’abord, d’Un monde existe (2002) à aujourd’hui, Le fait de vivre, en passant par Le Mot frère, Un peuple, Nos Amériques, Les Amours suivants, Les Oiseaux favorables, Vie commune, La Cité de paroles, témoignent assez bien déjà de l’ouverture de pensée de cette poésie qui, bien qu’étant fondamentalement lyrique, intime et pourquoi pas, disons-le sentimentale, n’est jamais repliée sur elle-même, jamais narcissique et ne perd jamais de vue cet horizon commun que sont pour nous la vie, le monde et les autres surtout, avec qui nous les partageons.

 

De la profonde tristesse d’une séparation à laquelle difficilement s’accoutumer jusqu’à l’image finale d’une vie conçue comme une escrime à engager « sereinement » sur le mode « parade/riposte », le dernier livre de Stéphane Bouquet poursuit l’intention de ses textes précédents qui est de dire toute notre vie, en tentant comme il peut de défaire  ses nœuds de solitude, d’atteindre ce « Dimanche de l’année », ce « dimanche suprême », idyllique, où la formule du bonheur partagé donnerait l’illusion d’avoir enfin été, sinon trouvée, du moins suffisamment approchée pour en éprouver, ne serait-ce qu’un moment, les bénéfiques effets.

samedi 20 mars 2021

DU DÉSIR VERS SA FIN !

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 Et puisqu’avec doublement le printemps, le vrai + celui des poètes, il est question de "désir", comment résister, si fourni d’âge pourtant que me voici, à ces invitations.

J’espère cependant que nul ne me fera reproche d’avoir dans ces trois courtes pages cédé à ce désir aussi de réveiller nos sommeillantes métriques afin qu’un peu au moins de la jeunesse du monde et de la mienne et par là de la poésie, un peu de cet éclair, oui, comme aurait dit Char, toujours par là, me dure. 

vendredi 19 mars 2021

PARUTION. CONFIGURES DE TYPHAINE GARNIER AUX ÉDITIONS LURLURE.

Je signale bien que ne l’ayant pas encore lu le nouvel ouvrage de Typhaine Garnier. Une jeune poète dont le premier livre, Massacres, chez le même lurlure m’avait comme on le verra si l’on se reporte à la note que je lui avais à l’époque consacrée, pas mal intéressé. Ici l’auteur semble suivre un chemin proche quoique inverse, s’ingéniant à confiturer/reconfigurer à sa façon toujours terriblement inventive et drôle, à tous les sens et même un peu fripon du terme, la réalité crue et désespérément banale de sa propre existence. À bonne température (102 à 103 °) montée.

 

jeudi 18 mars 2021

DEUX OU TROIS CHOSES QU’IL ME FAUT DIRE.


De plus en plus j’appréhende ce moment de l’après-midi où il me faut bien ouvrir ma boite à lettres. Ce qui lorsque j’étais pensionnaire dans la bonne ville d’Arras, puis étudiant dans l’encore meilleure ville de Lille, me faisait battre parfois le cœur – c’était la saison des rêves et des amours ! – aujourd’hui m’angoisse. M’effraie. C’est qu’outre bien entendu l’État français qui continue de m’adresser ses tenaces contraventions pour des excès de vitesse dépassant pourtant rarement la limite autorisée, de plus de quelques centimètres/heure, mes amis auteurs, mes amis éditeurs, continuent d’utiliser cette boite sournoise pour m’empêcher de m’adonner à toutes sortes d’activités qui me seraient des plus bénéfiques comme d’abord de ne rien faire, ensuite aller promener le chien, regarder un bon film, préparer une pastilla, entretenir mon jardin, papoter avec mon voisin voire s’il me reste un bout de temps me remettre à ne rien faire ou m’occuper quand même un peu de mes propres poèmes. Qu’avec le temps il me semble, je délaisse. Ce qu’à mon sens ils ne méritent pas.

Recevoir de mauvais livres n’est en rien un problème.

mardi 16 mars 2021

MA SÉLECTION DE LIVRES RÉCEMMENT REÇUS. OUI À LA POÉSIE ACTIVE. ASSEZ DES PLACÉBOS !


 Des ouvrages dont il me reste encore à parler. Deux dont je connais depuis longtemps la qualité et la force d'écriture de leur auteur. Un que je viens de découvrir.

lundi 15 mars 2021

DE TOUTE LA PUISSANCE ORIGINELLE DE LA POÉSIE. ENHEDUANNA DE DENISE LE DANTEC à L'ATELIER DE L’AGNEAU.

Elle serait si l’on en croit les spécialistes le plus ancien des écrivains connus. Et comme la littérature à l’origine se confond avec la poésie, notre tout premier poète. Enheduanna dont le nom pourrait bien signifier « Noble ornement du dieu Ciel » fille du roi Sargon d'Akkad qui la fit grande prêtresse du Dieu tutélaire de la ville sumérienne d’Ur, en Mésopotamie, vécut aux alentours du XXIIIe siècle av. J.-C. soit plus d’un millénaire avant Homère, plusieurs siècles aussi avant ce Père de toutes les nations qu’est sensé être pour les grandes religions du Livre le patriarche Abraham. Son œuvre principalement constituée d’hymnes religieux nous est parvenue sous formes de plusieurs dizaines de tablettes sur lesquelles pour la première fois dans l’histoire nous parle un « je ». Un "je" revendiquant hautement son nom. Un « je » qui n’est pas celui d’un homme. Mais celui d’une femme.

dimanche 14 mars 2021

AVEC LES DÉCOUVREURS, LIRE EN TOUTE GRATUITÉ L’ÉDITION NUMÉRIQUE DE COMPRIS DANS LE PAYSAGE.

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 Trois ans depuis qu’avec les éditions LD j’ai pu redonner le texte de Compris dans le paysage, publié pour la première fois en 2010 chez Potentille. Depuis j’ai eu l’occasion d’en parler régulièrement dans les classes qui m’avaient spécialement invité pour évoquer à partir de ce texte comment la poésie en tant que parole profondément intime pouvait – si elle le pouvait – aborder la question de l’horreur dans laquelle historiquement baignent les sociétés. Je remercie chaleureusement les professeurs qui m’auront donné cette occasion rare de faire entendre dans toute sa richesse et sa complexité un travail qui en dépit de sa brièveté m’aura beaucoup appris sur la nature et les pouvoirs de la parole poétique et largement contribué à construire la représentation théorique que désormais je m’en fais et cherche à travers mon travail critique à partager. Peu d’exemplaires en sont maintenant disponibles. Et le succès que je découvre des tous nouveaux Cahiers numériques de Poésie en Partages que j’ai récemment lancés me prouve que l’on aurait bien tort de systématiquement vouloir éditer sur papier, ce qui oblige à les vendre, des productions qu’on peut mettre si facilement à disposition de tous en employant les outils que nous offre le net. C’est pourquoi j’ai décidé de partager dorénavant, en toute gratuité, Compris dans le paysage avec tous ceux qui voudront bien s’y intéresser.