Je ne sais ce que valent ces étiquettes que le plus souvent on lui attribue de peintre autodidacte, d’artiste naïf, que sais-je ? Quand on ne le ramène pas seulement à la couleur de sa peau. Tout ce que je sais c’est que ce peintre américain qui effectivement n’aura suivi les leçons de personne et aura toujours déclaré qu’il peignait ce qu’il voyait, me touche depuis longtemps. Principalement ses scènes d’intérieur dans lesquelles il fait éclater les blancs et autour d’eux les présences. Des choses aussi bien que des êtres. Dans toute la puissance des sentiments.
Ne voulant pas trop contribuer au réchauffement climatique en mettant inutilement en ligne ici quantité de photos qu’on peut retrouver facilement ailleurs, je ne partagerai que ce montage où au-dessous de son autoportrait on découvrira le dernier de ses tableaux dans lequel il se représente assis sur un banc. Dans la partie droite de ce montage je recommande cette œuvre intitulée Holy Mountain[1], inspirée à l’évidence des toiles de l’américain Edward Hicks (1780-1849), Le Royaume pacifique. Il faut regarder attentivement cette image, pour voir que l’Eden ici représenté reste menacé par toutes les violences du monde. Une forme de pendu, allusion aux persécutions subies par les noirs principalement dans le sud des Etats-Unis, y apparaît le long du tronc d’un des arbres de gauche[2], tandis que sur la droite, à l’intérieur de la forêt d’où ressort une semaison de pierres tombales blanches, des soldats font la guerre. Datée intentionnellement du jour où les américains ont lâché leur bombe sur Nagasaki, cette œuvre, dont les taches rouges figurant des coquelicots rappellent aussi les « poppies » qui en Angleterre sont devenus la fleur du souvenir de la première guerre mondiale, oppose ainsi le rêve d’une paix universelle aux cauchemars du XXème siècle. « Holy Mountain, commente Horace Pippin, came to my mind because the whole world is in such trouble, and in reading the Bible (Isaiah 11:6) it says that there will be peace in the land. If a man knows nothing but hard times he will paint them, for he must be true to himself, but even that man may have a dream, an ideal — and ‘Holy Mountain’ is my answer to such dreaming. »
Il est intéressant, encore que terriblement déprimant, de savoir qu’il existe au Metropolitan Museum de New York une quatrième version de cette Holy Mountain, sans doute laissée inachevée par la mort de l’artiste, où l’homme a totalement disparu et ne subsistent que trois bêtes sauvages, un lion, un loup, une panthère, dessinées rapidement comme à l’encre, au premier plan d’un paysage dans lequel ne se dresse plus que le tronc totalement nu d’un arbre réduit à quelques branches.
No comment.
[1] Il s’agit là de la dernière version de la série de trois qu’il a consacrée à ce thème. Elle est conservée au Smithsonian Institut de Washington.
[2] « At the extreme left you will see what they did and are still doing in the South. If contemporary reviewers noticed the limp figure dangling from the branch in the forest, none mentioned it. » Déclaration d’H. Pippin à propos de son tableau.
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