FELIX VALLOTTON LE BALLON 1899 |
Oui. Il y a quelque chose. Il y a vraiment quelque chose dans les poèmes et dans la façon surtout qu’elle a de les dire, de la comédienne et poète belge Laurence Vielle. Une dynamique de la parole accrochée à la vie ou de la vie accrochée à la parole y rejoint une part de notre laborieuse humanité en route sur la terre, s’émerveillant, dénonçant, s’essoufflant, repartant... pour emporter le lecteur/auditeur/spectateur loin loin loin, dans ce qu’il a pourtant de plus proche et le touche au plus profond.
Parente à certains égards de
celle toujours renouvelée, libre et joueuse d’un Prévert, la poésie de Laurence
Vielle n’a rien d’intellectuel. De philosophique. Encore moins d’hermétique. Si
elle est travaillée, ce n’est pas dans le sens d’une complication métaphorique
ou de la recherche d’une certaine originalité d’images ou de vocabulaire. D’un
retardement voire d’une suspension de sens. Elle surgit au contraire, tout
entière d’allant et d’évidence. Pour coller à la vie ordinaire dont elle mélange
les histoires sans jamais les enfermer dans leurs pseudos vérités naturalistes.
Certes, cette poésie toute
d’empathie avec les êtres et le monde, n’évite pas toujours le piège des
représentations convenues. Mais quelle poésie aujourd’hui est parfaite ? Qu’importe
d’ailleurs le schématisme de certaines évocations telles que celle de
l’employée de Grande Surface responsable de la mise en place des fameuses Têtes
de Gondoles (T.G.), voire celle encore de Rimbaud
le fugueur ... elles ne sont en fait que matières à laisser s’exprimer
l’hypersensibilité d’un auteur qui se sent de partout rattachée à tout ce qui
existe. À fleur de peau. À fleur de
mots. Que ce soit la Terre qui tourne, tourne et la fait « rouler avec elle / comme une bille »,
le Temps qui passe, passe, passera et la relie tout autant à ses plus lointains
ancêtres qu’à ses plus distants descendants.
Effaçant autant qu’elle peut les
frontières entre intérieur et extérieur, Laurence Vielle invente ainsi une
poésie poreuse toute en circulation où par l’obstination du souffle, la reprise
insistante d’haleine, le petit moi, « tout maçonné, tout cimenté » comme écrivait Giono, se déclot, se laisse traverser par les multiples
et si contrastés courants qui emportent la vie. Souvent la découragent. Y
répondant toutefois, par une folle dépense d’énergie OUF qui ne s’accorde que juste le temps qu’il faut pour souffler. Se
redonner de l’air ! OUF. Avant de repartir de plus belle pour écarter toujours
davantage les barreaux de notre univers.
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