André ROBILLARD, LAM, Villeneuve d'Asq |
L’Atelier de l’Agneau vient
de publier Bande de Gaza, un
intéressant texte de Sylvie Nève que certains peut-être se souviendront d’avoir entendu, il y a quelques années, sur les antennes de Radio-France sous la
forme d’un oratorio mis en musique par le compositeur Éric Daubresse. Le livret
de cet oratorio s’accompagne de textes plus récents dont l’un d’ailleurs réagit
au propos d’un journaliste trouvant apparemment surprenant que l’auteure ait écrit, sans «y avoir jamais
mis les pieds », sur cette terre qu’elle a décidé, non de chanter, mais
de prendre comme objet de pensée « pour
y comprendre quelque chose ».
Il
est assuré que si l’on devait toujours mettre physiquement le pied là où l’on a choisi de porter
sa parole, le champ de la littérature s’en trouverait fort rétréci, au seul bénéfice sans doute de ce que Mallarmé appelait l’universel reportage. Et si l’on peut juger condamnable pour un
poète de prétendre parler, en
lieu et place des autres qu’il imagine et de loin, il serait absurde de lui interdire
le droit de réfléchir - à sa façon et
aux divers sens du terme, ne serait-ce que pour mieux sortir de ses propres
enfermements - tout espace ou fraction du monde par quoi il se sent intimement
questionné.
Ainsi,
même s’il nous parle d’un lieu géographique que l’auteur n’a jamais de ses
propres yeux vu, on ne manquera pas d’apprécier la manière dont le travail de
Sylvie Nève cherche à faire résonner dans ses pages, le bourdonnement babélique souvent
terrible de cet espace comme confisqué du monde dont elle parcourt avec entêtement
les figures trop souvent éclatées. On sera également sensible à la volonté
qu’elle affiche, faisant brèche aux Murs de tous ordres de dérouler – reprenant
un peu la formule du célèbre poème-partition d’Heidsieck, Vaduz – la litanie de toutes les nationalités qui gravitent, autour
de cette petite langue maltraitée de terre, pour composer avec elle le concert
de notre fertile, diverse mais aussi, regrettons-le, toujours bien impuissante humanité.
Lire le tout dernier texte du livre.
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