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L'Ange pauvre de Paul Klee |
Quel est le lieu aujourd’hui du poème ? Et quel en est toujours la puissance agissante ? En intitulant son dernier livre Les Utopiques, I, il semble que le poète Gilles Jallet, qui se réfère ici comme l’indique son Préambule, aux grands modèles devenus canoniques que sont Les Pythiques (Pindare), Les Bucoliques et Les Géorgiques (Virgile), Les Tragiques (Agrippa d’Aubigné), les envisage plutôt dans leur perte, leur dissolution que dans leur entière et pleine maîtrise ou possession.
Se référant aussi aux Anges pauvres de Paul Klee, ce peintre qui sur sa pierre tombale aura fait écrire qu’il « habite aussi bien chez les morts que chez ceux qui ne sont pas nés encore, un peu plus proche de la création que de coutume, bien loin d’en être jamais assez proche », Gilles Jallet nous apparaît bien conscient aussi de la profonde ambivalence de toute véritable production poétique qui est face au réel de s’éloigner du même pas qu’elle s’approche et dans son rapport au sens, de le voir s’évanouir dans le même temps qu’il s’exhibe. Si bien qu’il faut sans cesse y revenir. Dans l’écrire et le lire. Accepter de n'exister que dans cet insaisissable et mouvant entredeux.