Dans ma peau, un livre de Guillaume de Fonclare
qu’une amie m’a très récemment donné à lire, connaissant mon intérêt pour ce
qui a trait aux paysages de la Grande Guerre, est un livre que je qualifierais
volontiers de touchant si je pouvais
débarrasser le mot de cette nuance de niaise et visqueuse sensiblerie qu’il prend
aujourd’hui de plus en plus à la une des media populaires. L’auteur, alors
directeur de l’Historial de la Grande Guerre de Péronne, y raconte son combat
quotidien contre une maladie dégénérative qui le rend prisonnier comme il
l’écrit « d’une gangue de chair et
d’os » et l’amène à se retrancher progressivement dans les limites de
plus en plus étroites et mesurées des déplacements que lui permet sa résistance
à la souffrance. On le voit à ces diverses formules : difficile pour lui
de ne pas établir de parallèle entre sa douloureuse et mal supportable
condition et celles de ces millions et millions d’hommes dont l’établissement
qu’il dirige a charge d’entretenir l’émouvant et ô combien pitoyable souvenir.
Chacun à notre place nous sommes les acteurs de la vie littéraire de notre époque. En faisant lire, découvrir, des œuvres ignorées des circuits médiatiques, ne représentant qu’une part ridicule des échanges économiques, nous manifestons notre volonté de ne pas nous voir dicter nos goûts, nos pensées, nos vies, par les puissances matérielles qui tendent à régir le plus grand nombre. Et nous contribuons à maintenir vivante une littérature qui autrement manquera à tous demain.
jeudi 28 mars 2019
lundi 18 mars 2019
À LIRE ! DU TRAVAIL DE JEAN-PASCAL DUBOST. APOLOGIE DU POÈTE EN LIBRE TRAVAILLEUR.
Ceux que l’activité littéraire, de nature plus spécialement
poétique, intéressent encore, trouveront j’imagine matières à réflexion et autres
nourritures délectables à la lecture du bel ouvrage de Jean-Pascal Dubost, Du travail, paru récemment à l’Atelier
Contemporain. Ouvrage comme on dit de résidence, le livre de J.P. Dubost
s’écarte toutefois de ce genre souvent un peu léger de production par
l’importance de l’investissement personnel dont il fait montre. Du travail est un travail solide.
Sérieux. D’un sérieux n’excluant heureusement pas l’humour et la fantaisie. Dont
l’intérêt pour moi réside aussi dans le fait qu’il se présente sous la forme
d’une aventure de pensée, menée « en
état de crise poétique et morale », crise dont l’auteur nous conte et compte aussi les
péripéties, sans les abstraire du pittoresque des circonstances où elles sont
nées.
lundi 11 mars 2019
ANTOINE ÉMAZ ET LES DÉCOUVREURS. MERCI.
Gravure de Martine Rassineux sur un poème d'A. Emaz. |
Le poète Antoine Émaz qui figura à plusieurs reprises dans la
sélection du Prix des Découvreurs, est mort le 3 mars dernier. Il rejoint la
liste qui commence à être longue des disparus que nous aimons et qui comme par exemple
Ludovic Janvier ou Fadwa Suleimane, resteront encore longtemps bien présents
dans notre cœur.
C’est Ariane Dreyfus, je crois, qui la première m’incita, à
l’occasion de notre rencontre à la fin des années 90, à me rapprocher d’Émaz
pour laquelle, outre une grande admiration pour son travail poétique, elle
éprouvait un véritable attachement pour les qualités humaines dont il savait
l’accompagner. Et c’est donc assez naturellement que je lui proposai de figurer
dans la sélection d’estampes que sur la proposition du maître typographe
François Da Ros et de sa compagne Martine
Rassineux, graveuse, je réunissais pour qu’ils en fassent la magnifique série qu’on
peut toujours découvrir sur leur site.
vendredi 8 mars 2019
BIENTÔT L’HEURE DES GRENOUILLES PENSANTES ? RENCONTRES EN MILIEU SCOLAIRE. LA MEL. LA RÉFORME DES LYCÉES...
« Nous ne sommes pas des grenouilles pensantes, nous ne sommes pas des appareils objectifs et enregistreurs avec des entrailles en réfrigération, — il faut sans cesse que nous enfantions nos pensées dans la douleur et que, maternellement, nous leur donnions ce que nous avons en nous de sang, de cœur, d’ardeur, de joie, de passion, de tourment, de conscience, de fatalité. La vie consiste, pour nous, à transformer sans cesse tout ce que nous sommes, en clarté et en flamme, et aussi tout ce qui nous touche. »
C’est à ces magnifiques paroles de Nietzsche, extraites du Gai savoir, que je songe immanquablement
avant chaque rencontre. Notamment en milieu scolaire. Que j’y intervienne comme
poète, même un peu négligé par ses pairs, ou plus indirectement comme
accompagnateur et organisateur.
lundi 25 février 2019
LES DÉCOUVREURS AU LYCÉE KERNANEC DE MARCQ-EN-BAROEUL. ENTRE LA PAROLE ET LA VIE.
CLIQUER DANS L'IMAGE POUR DECOUVRIR LE PADLET |
Et puis parce qu’il faut surtout
penser à la vie et ne pas toujours regarder la face la plus sombre des choses,
je suis heureux à la suite de mes deux dernieres interventions sur ce blog d’y
partager aujourd’hui le travail réalisé par les élèves de 1 S du lycée Kernanec
de Marcq-en-Barœul, près de Lille, sous la direction de Marie-Juliette Robine,
une professeur admirable que j’ai la chance de connaître depuis plus d’une
dizaine d’années.
J’espère de tout cœur que ces
lectures contemporaines si diverses accomplies par les jeunes gens dont s’occupe
Marie-Juliette, auront permis à beaucoup d’entre eux, de libérer, comme c’est l’objectif
des Découvreurs, cet élan qui va de la
parole à la vie et de la vie à la parole.
Découvrir le padlet : https://padlet.com/MRobine/prixdesdecouvreurs
jeudi 21 février 2019
AVEC LA MORT QUARTIER D’ORANGE ENTRE LES DENTS. DISPARITION DE MARIE-CLAIRE BANCQUART.
J’apprends aujourd’hui la mort de Marie-Claire Bancquart. Elle fut l’une
des toutes premières véritables poètes vivantes qu’il me fut donné de
rencontrer. L’une des premières aussi que j’imaginais de faire rencontrer, il y
a une bonne trentaine d’années, à mes élèves et à se voir sélectionnée pour le
Prix des Découvreurs. Les mots me manquent pour exprimer la reconnaissance que
j’ai à la fois pour l’accueil qu’elle m’a réservé et la haute idée de la poésie
qu’elle a contribué à forger en moi. La mort n’était pas pour elle cette chose
terrible et angoissante que presque tous nous craignons. Mais une réalité qui
continue à nous faire participer au grand devenir de l’univers. Elle était ce
quartier d’orange dont le jus coule entre nos dents, image qu’elle reprit en
titre pour l’un de ses plus beaux recueils paru en 2005 chez Obsidiane. Et au
sujet duquel je me permets de reprendre ce que je lui en écrivais après l’avoir
reçu.
À LIRE ! DESTINATION DE LA POÉSIE DE FRANÇOIS LEPERLIER AUX ÉDITIONS LURLURE.
François Leperlier
nous livre dans cet ouvrage qui ne devrait pas manquer de faire réagir, les réflexions
que lui inspire « la situation actuelle de la poésie ». Si la
critique qu’il fait des multiples tentatives de médiatisation dont fait aujourd’hui
l’objet la poésie et dont par ailleurs il affirme qu’elles restent pour l’essentiel
sans effet réel, apparaîtra à certains excessivement radicale, il y aura
profit, je pense, pour chacun, à profiter de la vision qu’il donne de la
nécessité profonde de l’expérience poétique pour approfondir sa réflexion sur la
« destination » de son propre engagement.
Oui. C’est aussi pour moi une évidence. Le poème, cet
accompli dispositif de figures, cet assemblage singulier de rythmes et de mots
par lesquels il se donne à lire ou entendre, ne peut être dissocié de ce qui
vitalement l’anime, le traverse : élan, poussée ; de ce soulèvement
profond et comme rassemblé de ce qu’on peut appeler l’être ou l’âme ou l’imagination,
l’intelligence peut-être aussi… qu’importe. Et c’est pourquoi, je comprends que
certains voient dans ce qu’on appelle poésie,
une dimension, une aspiration fondamentales de l’humanité qui bien au-delà des
mots s’expriment dans la totalité des activités créatrices par lesquelles, sans
cesse, nous ajoutons concrètement comme idéalement, de la réalité à la réalité.
De l’imaginaire aux imaginaires. Dont nous sommes tissés.
Sans doute y-a-t-il quelque risque à trop diluer les
concepts et continuer à n’évoquer par le mot poésie que le genre littéraire qu’il désigne, tout en restant bien
conscient du flou et de la grandissante perméabilité de ses limites, permettra
peut-être de nous éviter bien des dialogues de sourds. Toujours est-il que je
reconnais bien volontiers à l’ouvrage de François Leperlier, Destination de la poésie, qui y voit,
lui, le principe générateur, non seulement de tout art mais de toute expérience
de conscience sinon de présence véritables au monde, le mérite de mettre ainsi
mieux en lumière le type d’exigence que sa pratique personnelle comme son mode
d’existence à l’intérieur de la société, réclament.
jeudi 7 février 2019
L'OCA NERA, LA NOUVELLE MACHINE DE LECTURE DE GÉRARD CARTIER. À LIRE !
CLIQUER DANS L'IMAGE POUR LIRE LA SUITE DU TEXTE ET LES EXTRAITS |
L’Oca nera ( titre italien, en français : l’Oie noire ) : je reviendrai sans doute sur cet assez singulier roman que Gérard Cartier vient de publier à La Thébaïde. Il y est question de toute une série de choses qui se succèdent, s’imbriquent, pour y dessiner la forme toujours un peu difficile à saisir d’une vie envisagée dans ses différents plans : géographique, historique, familial, professionnel, sentimental, intellectuel…
samedi 2 février 2019
AVEC EDDY L. HARRIS : DES VOYAGES QUI EN VALENT LA PEINE !
C'est toujours avec le plus grand plaisir que nous recevons
notre ami, l'écrivain américain installé en Charente, Eddy L. Harris. Ses interventions régulières dans les classes du
lycée Berthelot de Calais qui a pris l'habitude de l'accueillir produisent
toujours la même forte impression par la liberté de ton et la joyeuse
décontraction qu’il affiche. Et il est réjouissant d’imaginer que nous donnons
ainsi aux jeunes qui le découvrent, accès à un auteur que certaines prestigieuses
universités américaines aimeraient pouvoir s’attacher davantage.
mercredi 30 janvier 2019
À LIRE ! DÉNONCIATION D’UN BEL EXEMPLE DE KLEPTOCRATIE MODERNE. LE SOLILOQUE DU ROI LÉOPOLD DE MARK TWAIN.
Les éditions L’œil
d’or, qui ont entrepris en 2004, de se lancer dans la publication des
œuvres de Mark Twain en faisant appel à la même illustratrice, Sarah d’Haeyer
et surtout au même traducteur, Freddy Michalski, bien connu des amateurs de
romans noirs américains pour ses traductions notamment d’Ellroy, de James Lee
Burke ou d’Edward Bunker, viennent de sortir un ouvrage qui, par les temps
qui courent, ne devrait pas manquer d’intéresser un certain public. Celui que
révolte le cynisme ou l’hypocrisie par lesquels les puissances qui sont
parvenues à conquérir le droit de nous gouverner tendent à dissimuler, tant à
leurs yeux qu’à ceux des autres, les ravages que leur politique, causent au
sein des populations qu’elles devraient avoir pour vocation de protéger.
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