vendredi 23 avril 2021

SUR L’ÉCART QUI EXISTE, UN LIVRE D’OLIVIER VOSSOT AUX ÉDITIONS LES CARNETS DU DESSERT DE LUNE.

On ne sait trop de quoi parle précisément le livre d’Olivier Vossot qui tantôt évoque, à la troisième personne, l’alcoolisme destructeur du père, à la seconde, le travail créateur du grand-père poète, et à la première du pluriel comme à l’impersonnel, cette rumeur surtout qui partout de nos vies enfle. On ne sait rien du « tumulte que chacun porte ». Des pensées retenues. On reste pris dans cette brouille incertaine des choses. Ces lumières et ces ombres qui de partout font signes. Mais signes de silence. On comprend cependant qu’il est des enfances qui d’être confrontées à des figures de fuite et de chagrin, des existences lourdes, trop lourdes à porter, n’en finissent pas d’éprouver envers tout leur distance.

En courtes phrases tantôt interrogeantes, tantôt, peut-être à l’excès, gnomiques mais toujours d’une belle tenue, le texte d’Olivier Vossot tente de rendre compte de cette mémoire de vivre qui colore chaque instant de notre vulnérable et perméable présent. C’est émouvant. Fragile et secret à la fois. Comme une vitre à travers laquelle regarder le temps. En y posant comme c’est dit les doigts. Sans la pouvoir ou la vouloir ouvrir.

 EXTRAITS CHOISIS

 

Il est toujours question d'une lumière,

ampoule au mur terne

une attente, la vague odeur de médicaments

enfant, au milieu de regards dilués.

Lui n'est pas là, ne vient pas.

Le jour d'hiver pâlissait aux fenêtres,

dans la salle, il ne fallait plus que cela finisse,

on était bien.

Ce que nous attendions, elle et moi

n'était pas que l'alcool lui passe,

ni que le silence, la nuit épaisse,

enfin, se jette sur nous

avec son mufle usé, sali.

C'était un autre silence,

un autre temps, l'écart qui existe entre durer et tenir.

p. 21

 

 

Comme une rumeur nos vies enflent.

Que savons-nous du tumulte que chacun porte ?

Nos pensées, boue des jours piétinés, s'effacent,

leur silence balaie tout.

p.76

 

 

Il me reste tes poèmes,

le pincement des lettres,

les contours flous de ce temps.

J'ai traversé l'âge que tu avais

quand tu écris les premières fois.

Je regarde peu,

classeur aux feuilles serrées, creusées.

Un hiver. Des pas, neige sur le gravier,

 ombre de ta main mouvante.

C'est là, vitre où poser les doigts

sans ouvrir.

p. 78


 

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