Pris comme je suis par les
Découvreurs, je ne voudrais pas oublier que je fus aussi et le reste encore un
peu parfois, poète. Qui veut dire que je mets de la parole en voix, la passe
dans la langue, cette belle langue commune qui ne permet pas seulement que le
partage. Confère aussi rayonnement. Puissance. Rendant la parole élargie.
Plus profonde. De tous ces siècles qui l’auront vu se nouer aux vies qui nous ont
précédés.
Alors je sais et le lis presque
chaque jour sur ces réseaux devenus les confidents de nos fragiles existences, que
si nos œuvres parfois largement nous dépassent, elles tombent le plus souvent
dans la plus vaste indifférence. Ne brillent ou ne s’éclairent dans le monde qu’un
très court et pour nous bien trop court, instant. Quand on sait que le temps seul et ses durées leur donnent l’occasion de pouvoir y
déployer ce que j’ai pu appeler leur fossile rayonnement.
Face à l’indifférence, peu de
choses sont possibles. Si ce n’est de se construire patiemment dans le monde une position qui
oblige le grand nombre à vous accorder un semblant d’attention. Occupation qui
n’effraie pas les gens dont la vanité sociale excède largement le talent. Pour
les autres peut-être leur faut-il se persuader qu’en matière d’œuvre, d’œuvre
artistique, bien entendu, compte essentiellement ce travail qu’elle permet sur
soi. Le monde aussi, qu’elle redonne à voir, à sentir, à penser, à porter, autrement. Et, me semble-t-il, avec un surcroît de force.