J’avais prévu après avoir rendu comme j’ai pu compte de l’intéressant ouvrage de Yannick Fassier, Le Soc, d’en reprendre ici quelques extraits consistants permettant non seulement de se faire une idée de l’écriture assez singulière de ce livre mais de nourrir un peu plus encore les pistes de réflexion finalement assez nombreuses que ce blog a entrepris de suivre. Les images que je viens de poster de quelques toiles du peintre suédois Liljefors m’ont amené à choisir ces quelques pages que je trouve personnellement lumineuses à propos de l’opposition entre le végétal et l’animal. Des propos qui ne sont pas chez moi sans entrer en résonance avec de nombreux autres textes comme la célèbre huitième élégie de Duino de Rilke, tel passage d’Italo Calvino sur l’herbe[1] ou encore d’Augustin Berque[2]voire bien sûr des ouvrages comme celui de Baptiste Morizot Manières d’être vivant…
J’ai adjoint à ce long extrait un plus court passage sur la façon dont à travers la mémoire, la lecture, l’écriture, la culture donc, les morts se conjuguent pour toujours aux vivants. À l’infini.
Nature morte — Le groupe ne rend pas l'animal plus fort, il retarde seulement sa mort. II facilite la résistance de son individualité. Le groupe se sert du nombre. Il y a une différence de nature entre la vie en réseaux du végétal et la vie individuelle de l'animal, au sens d'individu, qui vit en collectif. Lorsque je regarde une prairie, je ne vois pas un troupeau. Je vois une vie qui a la possibilité de se revivifier, de se régénérer au fil des saisons. La prairie ne vieillit pas, alors que le troupeau vit sans cesse sous la menace de son extermination.