lundi 7 septembre 2020

RETOMBER DANS LE MONDE. LA POÉSIE MALGRÉ TOUT. POUR FUIR AUTANT QU’IL EST POSSIBLE LA TRISTESSE D’EXISTER.

 


Au moment où d’aucuns qui pourtant jouissent toujours sur le net et les réseaux sociaux d’une enviable visibilité s’interrogent [1] sur l’intérêt de poursuivre leur tâche devant la forte concurrence produite par ces mêmes réseaux et les habitudes surtout de consommation superficielles et narcissiques qu’ils engendrent, que dirai-je moi, pauvre hère, qui depuis des lustres et des lustres, voit l’incessant travail de pensée – de pensée sensible - que je mène, n’intéresser toujours, à ma connaissance, qu’une poignée de personnes qui de plus ont, pour la plupart, la discrétion de ne pas trop me faire savoir ce qui les retient ou les a retenu, à la lecture des quelques pages de moi qu’ils ont pu feuilleter.

 L’existence de Retomber dans le monde, qu’avec les éditions LD, j’ai conçu pour être accompagné par les œuvres plastiques de Michèle Riesenmey, découvertes par l’intermédiaire d’un ami commun, m’importe plus à moi, j’imagine, ainsi qu’à l’artiste qui y a collaboré, qu’à tous ceux dont la vie, j’en suis bien conscient, ne sera en rien modifiée par sa lecture. La  question de l’habitation des choses et de la langue qui s’y trouve agitée – c’est bien le mot – est une question qui n’est en rien nouvelle et ma façon, musicale, « musaïque [2]» qui sait, de la traiter n’a valeur de réponse que singulière. Sans que le mot de réponse ici ait valeur de solution. 

Pourquoi alors venir sur ce blog attirer l’attention des quelques dizaines de personnes qui viendront s’y pencher ? C’est sans doute qu’il nous faut fuir autant qu’il est possible, la tristesse d’exister. Tristesse qui nous viendrait d’avoir à limiter pour toutes les raisons qu’on sait, notre puissance, même impuissante, d’être ou de vivre. Il y a de la joie, une vraie joie, comme Giono parlait des vraies richesses, à créer. Sans calcul. À partager. C’est là le signe comme l’ont dit bien d’autres, d’une santé morale, peut-être aussi physique, qu’il importe de ne pas laisser s’abîmer, s’éteindre. Et permet surtout d’affronter aussi bien la sourde petitesse que les éclatantes abominations, les limites aussi toujours plus indécises de notre condition. 

D’où nous est à chaque instant donnée la possibilité de retomber dans le monde. Sans en être écrasé.

 N.B.

Cet ouvrage d’une petite trentaine de pages n’étant tiré qu’à 100 exemplaires pour certains accompagnés d’une œuvre originale de Michèle Riesenmey,  nous ne ferons pas de service de presse. En revanche chacun pourra à sa guise feuilleter l’ouvrage dans une version produite sur CALAMEO. Cliquer ici :  https://www.calameo.com/read/00620322744892c8ccb7e?authid=F919LcpzAjGJ



[1] Je fais ici bien sûr allusion à Angèle Paoli qui avec son compagnon, Yves, ont construit depuis plus de quinze ans avec leur blog terresdefemmes, cet exceptionnel espace d’enregistrement et de découverte d’une large partie de la poésie contemporaine qui complète assez bien - les goûts et les choix n’étant pas les mêmes - cet autre monument connu sous le nom de POEZIBAO. Bien sûr aussi j’ai bien conscience de mettre ici sur le même plan des réalités qui ne sont pas de même nature. Toutefois je ne fais pas, en ce qui me concerne une distinction si radicale entre le travail de poète et celui de critique. Si je comprends bien qu’on peut se lasser de mettre toute son énergie au service des autres ou des débats souvent formels d’idées, l’exercice critique, en tout cas tel que je le plus souvent je le pratique, est une façon de me relier par la parole à la vie, et l’expression d’un engagement où je mets plus que ma culture et mes facultés tout intellectuelles de jugement. En ce sens, c’est bien à moi que d’abord il apporte.

[2] Au sens où l’emploie le philosophe italien Giorgio Agamben, dans La musique suprême, Musique et politique, in Qu’est-ce que la philosophie ?  

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