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vendredi 7 mars 2025

REFUSER DE SE LAISSER ÉCRASER : VOIR L’ESTHÉTIQUE DE LA RÉSISTANCE MISE EN SCÈNE PAR CREUZEVAULT AU THÉÂTRE DE L’ODÉON.

Photo Jean-Louis Fernandez

 

Les quelque trois heures-vingt de représentation que dure l’adaptation théatrale qu’en fait Sylvain Creuzevault au théâtre de l’Odéon ne peuvent naturellement donner qu’une idée de l’immense travail d’histoire et de réflexion mené par Peter Weiss tout au long du bon millier de pages que comporte son Esthétique de la résistance qui, sur une dizaine d’années – en gros entre 1935 et 1945 – suit sur divers fronts la résistance allemande au nazisme tout en s’interrogeant sur les conditions susceptibles de donner à l’art un potentiel réellement révolutionnaire et de le rendre capable de renverser les processus de domination politique et économique permettant depuis toujours l’exploitation des plus faibles.

En revanche la claire intelligence que ce spectacle vivant, prenant, très varié dans ses formes et remuant chez le spectateur toutes sortes d’émotion, donne de l’œuvre de Weiss ne peut être aujourd’hui que profondément salutaire permettant à tous ceux que rebuterait la lecture d’une œuvre pour eux trop abondante en discours et fouillant de trop près le réel, de profiter quand même un peu de certaines de ses idées fortes. Dont la nécessité de l’engagement, qu’il mène ou non au succès, à la réalisation effective de ses idéaux, n’est pas ici la moins importante.

jeudi 28 septembre 2023

RECOMMANDATION DÉCOUVREURS : LA SEPTIÈME CROIX D’ANNA SEGHERS CHEZ MÉTAILLIÉ.

Premier roman de l’histoire de la littérature européenne à se pencher sur l’univers des camps ouverts par l’Allemagne nazie au lendemain de sa conquête du pouvoir, l’ouvrage d’Anna Seghers, La Septième croix a commencé à être rédigé en France dès 1938 pour être terminé en 1941, à Mexico où l’auteur aura dû se réfugier. C’est en 1947 que les éditions Gallimard en publieront la traduction française avant que les éditions Métaillié ne la reprennent dans une nouvelle traduction de Françoise Toraille. Et disons-le tout de suite, ce livre dont on aura pourtant relativement peu parlé, comme le fait remarquer Jean Birnbaum dans un article du Monde où il constate, à l’occasion de la réédition de 2020, que son Journal n'en aura jusque là jamais même fait mention, est un livre admirable et toujours nécessaire.

Georg Heisler à qui, au camp de Westhofen, est destinée cette septième croix qui donne son titre au roman, s’est évadé en compagnie de six autres camarades qui seront l’un après l’autre repris puis suppliciés. L’enjeu ici, pour les autres prisonniers du camp à qui la mise en scène à la fois cynique et terrible imaginée par le commandant s’adresse, est capital. « Pour la plupart d'entre nous, ces évadés étaient à ce point une partie de nous-mêmes qu'il nous semblait que nous les avions envoyés en émissaires. Même si nous avions tout ignoré de leur projet, nous avions l'impression d'avoir réussi une entreprise rare. Pour nombre d'entre nous, l'ennemi semblait tout-puissant. Tandis que ceux qui sont forts peuvent sans souci parfois se tromper, sans rien y perdre, parce que même les plus puissants des hommes sont toujours des hommes — et d'ailleurs, leurs erreurs ne font que les rendre plus humains —, ceux qui se targuent de leur toute-puissance n'ont pas le droit de jamais se tromper, car ils sont tout-puissants ou ne sont rien du tout. Quand on réussissait à mettre en défaut, même de manière dérisoire, le pouvoir absolu de l’ennemi, alors, on avait réussi en tout. »

lundi 25 septembre 2023

À PROPOS D’UNE ÉMISSION DE THOMAS SNEGAROFF SUR L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE.

 

Le Golem, de Carl Boese et Paul Wegener, 1920

Une poignée d’invités intelligents et j’imagine compétents discutaient hier soir, sur le plateau de l’excellente émission de France 5 C Politique, de la question de savoir si l'intelligence artificielle nous rend ou non plus bête et par voie de conséquence fait courir un risque ou pas à l’ensemble de l’humanité. Étonnement pour moi de constater surtout en cette période d’alarmisme généralisé qu’une sorte d’unanimité semblait s’y faire sur le constat que la machine resterait toujours une machine et que n’ayant ni corps, ni sentiment, ni cette conscience que seule pensons-nous notre cerveau humain génère, elle ne deviendrait jamais plus qu’un outil finalement merveilleux nous permettant d’élargir presque infiniment le champ somme toute assez modeste de nos possibilités.