
"Il n'y a de conscience que dans les rues".
Je ne sais trop ce qu'entendait exactement par-là Albert Camus qui sans doute
voulait dénoncer le fait que l'homme moderne s'était coupé de la nature.
Toujours est-il que marchant dans les rues de Ferrare cette phrase résonne pour moi de façon singulière. Peu, j'imagine,
savent en effet que c'est à Ferrare, sous l'impulsion de la famille d'Este, que
furent réalisés pour la première fois et sur une grande échelle, les principes
d'urbanisme de la Renaissance conduisant à prendre en compte la "perspective urbaine" imposant à toute
nouvelle implantation architecturale de s'intégrer au plan d'ensemble de la
cité sans plus désormais ne se préoccuper que de ses propres dimensions
formelles. C'est ce qui rend aujourd'hui
la promenade dans ses rues si fascinante. On s'y trouve à chaque instant
confronté à des perspectives qui n'ont en fait qu'assez peu changé depuis plus
de cinq siècles. Et à l'intérieur desquelles la plupart des éléments y compris
"naturels" se trouvent en
harmonie.
Cela dit, à côté de
sa voisine Mantoue, Ferrare qui peut s'enorgueillir d'avoir accueilli aussi
bien de grands scientifiques comme Copernic que de grands écrivains comme
L'Arioste ou le Tasse, sans compter les peintres les plus éminents comme
Mantegna, Piero della Francesca, Jacopo Bellini ou Rogier van der Weyden,
n'aura conservé dans ses musées comme dans ses églises qu'un nombre
relativement modeste des chefs-d'œuvre auxquels elle a donné naissance. La
visite du Château Ducal est sur ce point - celui de l'histoire de la Peinture
- assez décevante. A mille lieux du
Palais de Te et du palais ducal des Gonzague qui sont un pur éblouissement.