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lundi 17 mars 2025

POUR CIMABUE. QUELQUES CONSIDÉRATIONS À PARTIR DE L’EXPOSITION DU LOUVRE


 

J’ai eu la chance de voir l’intéressante et instructive exposition réalisée par le Louvre autour de Cimabue. L’exposition est courte n’occupant qu’un assez petit espace mais fournit un merveilleux écrin à cette œuvre magistrale qu’est la grande Maesta conçue pour l'Église San Francesco de Pise et devenue propriété du musée depuis sa confiscation en 1813 par Napoléon.

Comme le disait il y a une vingtaine d’années le peintre Soulages, on ne parle généralement de Cimabue que comme un précurseur de Giotto, rappelant la formule de Dante à son propos qui signale que l’élève s’est très vite emparé de la gloire promise à l’origine à son maître qui sut peut-être le premier libérer la peinture italienne, sinon occidentale, de l’emprise du style grec hérité de la peinture byzantine, en la faisant accéder à un certain réalisme.

mardi 18 février 2025

RETOUR SUR LES SENSIBLES COMMUNS.

Odilon Redon, L'Art céleste, 1894

 

Il y a de cela plusieurs années, pour tenter d’éclairer les discussions un peu vives provoquées par une réflexion[1] de Marie Alloy dans son bel ouvrage l'Empreinte du visible où elle soutenait en gros l’idée qu’on ne pouvait parler de la peinture qu’en poète, je proposais ces remarques tirées des réflexions d'une personne qui s'est beaucoup intéressée à l'expérience intuitive, Claire Petitmengin. Selon cette professeure et chercheuse en philosophie et sciences cognitives, nous vivons moins dans un monde d'images, de sons et de sensations tactiles, que dans un monde de formes, de mouvements, d'intensités et de rythmes, c'est-à-dire de qualités transmodales, transposables d'une modalité à l'autre, que le chercheur Daniel Stern appelle « vitality affects ». C’est cette transmodalité qui permettrait notamment à l'enfant d'expérimenter un monde perceptuellement unifié (où le monde vu est le même que le monde entendu ou senti). Ce serait elle aussi qui permettrait la résonance, l'accord entre deux univers intérieurs, base de l'intersubjectivité affective.

vendredi 7 février 2025

TIEPOLO. PRÉNOM GIANDOMENICO. POUR L’ALLANT SPECTACLE MALGRÉ TOUT DE LA VIE.

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Revoyant il y a quelques jours, pour les classer, les innombrables photos prises à Venise lors du dernier séjour que j’y aurai effectué, les bien surprenantes et attachantes fresques de Tiepolo rassemblées à la Ca’Rezzonico m’ont donné envie d’en savoir plus. On passe dans les musées, on passe dans les rues, on traverse des paysages, toujours trop vite. Et sans savoir vraiment. Et il est bon de prendre le temps parfois de s’arrêter pour comprendre, ne serait-ce qu’un peu ce qu’on croit avoir vu.

En fait, les Tiepolo sont deux. Goethe qui avait pu découvrir leur travail dans la Villa Valmarana ai Nani, à Vicenze, les confondait, célébrant dans son Journal, un style à la fois naturel et sublime, alors que ce « naturel » comme il disait, n’était propre qu’à Giandomenico, ce fils de Gian Battista dont le particulier génie continue toujours aujourd’hui à lui faire de l’ombre.

samedi 1 février 2025

IMAGES DE GIANDOMENICO TIEPOLO.


Je ne sais si je retournerai - l’âge ! - à la Ca’Rezzonico. Combien pourtant j’aimerais revoir la fresque du Mondo Novo de Tiepolo[1] et ses Pulcinelli ! Vraiment, je ne comprends plus trop, aujourd’hui, pourquoi cet artiste qui me semble, mais je n’ai rien d’un expert, tout aussi intéressant que Watteau avec lequel il partage d’ailleurs bien des choses, n’est pas davantage considéré, lui qui, à ma connaissance n’a encore fait l’objet, chez nous, d’aucun ouvrage d’importance. Et que beaucoup encore considèrent comme un « peintre mineur ».

Peintre virtuose au contraire, Giandomenico Tiepolo possède au plus haut point cette grâce, cette vivacité d’exécution, qui veulent ou plutôt font – car ici point d’affectation - que rien chez lui ne pèse ou bien ne pose. Il aura avec son père Giovanni Battista décoré les murs et les plafonds de certains des plus beaux palais d’Europe. Jusqu’à ce que toute la froideur du goût néoclassique vienne se substituer au dynamisme follement libre et lumineux, grandiose, de ce qu’avec mépris on appellera, dans le sillage de David, au tournant final donc du XVIIIème siècle, le « rococo ». Retiré les quelque vingt dernières années de sa vie, dans sa propre villa de Zianigo[2], il ne peindra plus, ou presque, que pour lui, ornant les murs et les plafonds de sa demeure de nouvelles figures qui ramènent le spectateur vers l’aujourd’hui d’un monde où les illusoires héros guidant d’une main à la fois sûre et légère le char qui leur faisait inventivement traverser le ciel, cèdent la place à des Polichinelles. 

jeudi 26 décembre 2024

SUPERBE EXPOSITION RIBERA AU PETIT PALAIS. EN PROFITER POUR RENDRE HOMMAGE À THEOPHILE GAUTIER.



J’aurais bien aimé voir ou revoir le Supplice de Saint Philippe ou le Songe de Jacob tous deux au Musée du Prado, comme son Suzanne et les vieillards ou sa superbe Nature morte à la tête de chèvre de Capodimonte qui aurait pu faire un magnifique pendant à sa tête de Saint-Jean Baptiste, mais il est vrai que l’œuvre de Ribera est si riche qu’on ne pouvait s’attendre au Petit Palais à pouvoir admirer l’ensemble des chefs d’œuvre qu’aura produit ce peintre tout au long de sa fertile et généreuse carrière.

vendredi 6 décembre 2024

BRAGUETTES, PEINTURE ET POÉSIE. DE DIVERSES IMPOSTURES.

 

Qu’ont encore aujourd’hui à faire les milliards d’hommes et de femmes que nous sommes sur la terre de ce Frédéric de Gonzague qui, autour de 1530, et très peu d’années aussi avant sa mort à l’âge de quarante ans, fit décorer pour célébrer sa puissance et magnifier les sentiments que peut-être il avait pour sa maîtresse, une certaine Isabella Boschetti, l’extraordinaire Salle des amours de Cupidon et Psyché dans son tout nouveau Palais de Te, construit sur les bords du Mincio, à Mantoue, par Giulio Romano ?

Federico voulait sans doute que le monde entier l’admire comme sans doute il s’admirait lui-même, s’étant fait représenter par le grand artiste romain sous la forme de Zeus. Un Zeus, en outre, puissamment monté, saisi en plein ébat avec une mortelle, l’épouse du roi de Macédoine Philippe, le futur père d’Alexandre le Grand. Federico, j’imagine, aurait eu, si l’époque l’avait permis, des millions et des millions de followers sur les réseaux sociaux. Multipliant par là de façon spectaculaire le nombre sans doute assez grand déjà de ses courtisans.

dimanche 24 novembre 2024

BEAUTÉS DE MANTOUE. II. PISANELLO ET LE TOURNOI BATAILLE DE LOUVEZERP.

 

 Dans l’une des innombrables salles qu’offre à la visite le Palais Ducal de Mantoue subsistent les restes en partie restaurés d’une grande fresque de Pisanello représentant l’un des épisodes du tournoi-bataille[1] de Louvezerp que raconte le Livre V du Tristan en prose composé comme chacun sait dans la première moitié du XIIIème siècle. Ces restes ne paraîtront sans doute qu’un fouillis au visiteur qui, après deux ou trois heures de visite n’aspire plus qu’à s’attabler devant un bon plat de tortelli di zucca ou d’un plus rustique et sec risotto al pilota qu’il pourra déguster soit au Ristorante Giallozucca, Corte dei Sogliari pas trop loin de la Basilique San Andrea, soit à l’Osteria Piazza Sordello 26, à deux pas de la sortie.

samedi 23 novembre 2024

BEAUTÉS DE MANTOUE. I.

Piazza SORDELLO

 

Certains peut-être l’auront remarqué, un peu lassé de toutes ces publications dont certains de leurs auteurs s’acharnent à faire jour après jour l’indiscrète publicité, je me tourne de plus en plus vers ces divers et nombreux espaces d’art et de culture qui, dans la relative ignorance où je suis d’eux, me donnent davantage à découvrir et me permettent aussi de me sentir appartenir au temps plus long et qui sait plus vivifiant et généreux de l’Histoire, une Histoire qui a encore tant et tant à nous apprendre et fourmille d’occasions d’exciter notre toujours insatisfaite et gourmande curiosité.

Foin donc des sourdes autant que pénibles actuelles mécaniques du moi. J’entreprendrai aujourd’hui de parler de Mantoue dont le nom m’aura longtemps fait rêver, associé qu’il est à celui de l’auteur des Georgiques et des Bucoliques ainsi qu’à celui du peintre de la Chambre des époux dans le magnifique Palais ducal qu’on découvre en pénétrant sur la place Sordello dont le nom célèbre un poète-troubadour dont on ne sait quasiment plus rien sinon l’élogieuse mention qu’en fit à deux reprises Dante inspirant sans doute par là le poème à lui consacré par l’écrivain anglais Robert Browning qui à son tour inspira Oscar Wilde ainsi peut-être qu’un court passage du Molloy de Beckett.

Arrivant à Mantoue une fin d’après-midi de novembre, à partir de l’autoroute Gènes-Milan que l’on quitte pour prendre la direction Piacenza, Cremona, on passe de la belle lumière ligure aux habituels brouillards de la plaine du Pô dont l’atmosphère un peu fantastique nous remet à mille lieux de celle que nous laissaient imaginer les merveilleux dessins dont Maillol, qui s’inspirait là sans doute plutôt de la région des Pyrénées orientales où il possédait une villa, naguère illustra les recueils de Virgile.

mercredi 20 novembre 2024

PLAISIRS DE FERRARE.



"Il n'y a de conscience que dans les rues". Je ne sais trop ce qu'entendait exactement par-là Albert Camus qui sans doute voulait dénoncer le fait que l'homme moderne s'était coupé de la nature. Toujours est-il que marchant dans les rues de Ferrare cette phrase résonne  pour moi de façon singulière. Peu, j'imagine, savent en effet que c'est à Ferrare, sous l'impulsion de la famille d'Este, que furent réalisés pour la première fois et sur une grande échelle, les principes d'urbanisme de la Renaissance conduisant à prendre en compte la "perspective urbaine" imposant à toute nouvelle implantation architecturale de s'intégrer au plan d'ensemble de la cité sans plus désormais ne se préoccuper que de ses propres dimensions formelles.  C'est ce qui rend aujourd'hui la promenade dans ses rues si fascinante. On s'y trouve à chaque instant confronté à des perspectives qui n'ont en fait qu'assez peu changé depuis plus de cinq siècles. Et à l'intérieur desquelles la plupart des éléments y compris "naturels" se trouvent en harmonie.

 

Cela dit, à côté de sa voisine Mantoue, Ferrare qui peut s'enorgueillir d'avoir accueilli aussi bien de grands scientifiques comme Copernic que de grands écrivains comme L'Arioste ou le Tasse, sans compter les peintres les plus éminents comme Mantegna, Piero della Francesca, Jacopo Bellini ou Rogier van der Weyden, n'aura conservé dans ses musées comme dans ses églises qu'un nombre relativement modeste des chefs-d'œuvre auxquels elle a donné naissance. La visite du Château Ducal est sur ce point - celui de l'histoire de la Peinture -  assez décevante. A mille lieux du Palais de Te et du palais ducal des Gonzague qui sont un pur éblouissement.

mardi 15 octobre 2024

RECOMMANDATION. L’EXPOSITION LILJEFORS AU PETIT PALAIS.



Pour en donner une petite idée, quelques oiseaux peints par le peintre suédois Bruno Liljefors dont les œuvres sont actuellement visibles au Petit Palais à Paris, un musée qui s’attache à faire découvrir aux publics des artistes inconnus, principalement, au cours de ces dernières années, d’origine scandinave.

C’est l’intérêt de ces expositions que d’élargir le regard que nous avons sur l’histoire en général de l’art et de faire apparaître toute la diversité des choix artistiques, voire philosophiques qui cohabitent au cours d’une même époque. J’imagine qu’un art comme celui que pratique de manière accomplie un artiste comme Liljefors parlera aujourd’hui à tous ceux que préoccupe la question du vivant. C’est-à-dire aussi du sauvage et de l’animalité. Dans un monde où tous les éléments oeuvrent à l’expression même parfois cruelle, de la vie.

jeudi 10 octobre 2024

SUR QUOI PORTER NOTRE ATTENTION. À PROPOS DU TRAVAIL D’UN PEINTRE MÉCONNU, BARTOLOMEO BIMBI.

 

À une grosse vingtaine de kilomètres au Nord-Ouest de Florence, dans la province de Prato, se visite aujourd’hui la superbe villa médicéenne de Poggio a Caiano. On est confronté à tant de beautés et de curiosités historiques dans Florence qu’on ne trouve malheureusement pas toujours le temps ou le courage de sortir de la ville pour se rendre en ce lieu.

La villa des Médicis à Poggio a Caiano n’est pas seulement l’endroit où j’aurai pu admirer l’extraordinaire lunette peinte par Pontormo dont j’ai fait ma carte de vœux de l’année qui se termine, elle présente également au second et dernier étage un ensemble de salles dévolues à la nature morte, expression qui toujours me hérisse tant elle présume que rien au monde ne serait réellement vivant en dehors de nous.

vendredi 4 octobre 2024

DEUX PEINTRES. SUR UNE PAGE D’UN LIVRE DE MARIE-HÉLÈNE PROUTEAU, ÉVOQUANT UNE GOUACHE PEU CONNUE DE GAUGUIN.

 


C’est la troisième des 26 courtes proses par lesquelles Marie-Hélène Prouteau dresse pour nous le tableau du « paysage premier » que fut pour elle la petite plage isolée du Finistère où elle eut la chance enfant d’habiter avec ses parents une maison de vacances[1]. C’est la toute première consacrée à l’évocation d’œuvres artistiques ou littéraires qui à côté d’observations ou de souvenirs plus directs ont contribué à rendre ces derniers plus saillants. D’une portée aussi plus générale et plus vive.

« Les Pêcheuses de goémon » de Gauguin sont en fait une gouache au format presque carré d’environ trente sur trente, réalisée au Pouldu en novembre ou décembre 1889. Cette œuvre qui fut au départ simplement accrochée au mur d’une pauvre « buvette », se trouve actuellement entre les mains d’un collectionneur privé et figure au catalogue de diverses expositions qui se seront déroulées tant à Tokyo, Washington, Graz que Paris[2]. Par chance, on peut la voir aussi sur le net, dans une excellente définition, grâce à l’irremplaçable Wikipedia.

mardi 1 octobre 2024

IMAGES QUI DEMEURENT DE LA TINTORETTA.


 Quelques images donc de la Fille du Tintoret. La seule dont on soit à peu près sûr est celle du centre : son autoportrait au madrigal de la Galerie des Offices à Florence. Sur notre gauche, au-dessus, le portrait de femme généralement attribué à son père serait selon les spécialistes de sa main. Comme le portrait d'homme sur la droite attribué à son frère serait en fait un autoportrait en vêtements d'homme lui aussi de sa main. La bande du bas correspond à une partie du tableau de Cogniet qu'évoque mon précédent article.

AUTOUR D’UN POÈME DE JEAN FOLLAIN ET DE LA FILLE DU TINTORET.


 

Le Tintoret peignit sa fille morte

il passait des voitures au loin

le peintre est mort à son tour

de longs rails aujourd'hui

corsètent la terre

et la cisèlent

la Renaissance résiste

dans le clair-obscur des musées

les voix muent

souvent même le silence

est comme épuisé

mais la pomme rouge demeure.

Jean Follain, Les choses données, Seghers, 1952

 

C’est peut-être, qui sait, du souvenir en lui d’un tableau du peintre français Louis Cogniet représentant le peintre vénitien Tintoret traçant une dernière image de son enfant bien aimée, que part le beau poème de Jean Follain. 

jeudi 18 avril 2024

À PROPOS DES COUVERTURES CONTEMPORAINES DE JOËL BASTARD CHEZ GALLIMARD.

 

 J’hésitais ce matin entre parler d’un tableau d’Ingres dans lequel étrangement je crois voir figurer un Magritte[1] et me casser les dents sur le très énigmatique recueil de Joël Bastard, Les couvertures contemporaines qui viennent de sortir aux éditions Gallimard[2]. Et si je tentais d’en parler ensemble ? Après tout il s’agit moins dans ce blog surtout dans ces derniers temps de rendre compte OBJECTIVEMENT d’une œuvre que d’en noter en moi, les prolongements.

mardi 19 mars 2024

PAYSAGES DE PAUL BRIL.


 

 Né à Anvers au tout milieu du XVIème siècle, mort à Rome en 1626, ce peintre qui aura su, au point d’être le premier peintre non italien à y être nommé à la tête de l’Académie de Saint-Luc, s’établir dans une Rome finalement pas trop accueillante aux artistes étrangers, aura, en matière de peinture de paysage, préparé la voie à Nicolas Poussin ainsi qu’à Claude Lorrain. Si les paysages qu’il traite au début de sa carrière ne sont pas sans rapport avec ceux de Patinir, volontiers fantastiques, leur arrière-plan se perdant dans des bleus caractéristiques et des formes rocheuses artificieusement découpées, ils évoluent peu à peu au cours de son séjour romain devenu pour lui l’occasion de les moderniser, d’en unifier la composition en les faisant baigner dans une lumière s’adoucissant en fonction de l’étagement des plans et des jeux de profondeurs subtils qu’il parvient à orchestrer grâce en particulier aux figures – hommes, animaux - qui les animent et s’y déplacent. J’aime assez son autoportrait qu’il réalise devant une toile qu’il vient d’achever et qu’il représente encore clouée sur son cadre. Comme si le peintre ici nous invitait à entrer dans son œuvre en nous rappelant qu’elle est bien le fruit d’une âme artiste, qui n’aurait utilisé ses pinceaux – qu’on voit aussi pointer vers lui, en trompe-l’œil -  que pour mieux nous faire entendre quelque chose, peut-être, de sa mélodie intime.