La langue qui
t'accompagne depuis toujours
Le toujours d'une
vie, de chaque vie -
A grandi en toi
comme une forêt
Et elle te permet de
dire la joie et la tristesse
La lune pâle et le
fleuve presque noir de ta ville
Quand tu le longes,
la nuit, plein d'amour
Elle te permet
d'appeler tes morts
Comme Adam appela,
quand il les eut nommés, les animaux
Et de les faire
venir à toi, dociles,
Du pays dont on dit,
pourtant,
Qu'on ne revient pas
Elle te permet de
rebâtir ton passé
De même qu'on
reconstruit une ville après une guerre ou un séisme
Souvenir par
souvenir
Même si parfois
certains s'écroulent à nouveau et qu'il faut recommencer
La langue qui
t'accompagne éclaire tes pensées et tes sentiments
Car elle est aussi
cela :
Un soleil qui
illumine les nuages d'où il émerge
Qui illumine la
terre sous lui avec ses plaines et ses collines
La langue venue du
rire et du lait maternels
De la chaleur des
jours anciens.
Poèmes fantômes, p.
69
éditions LansKine,
2023
poème attribué
fictivement par l'auteur à Damir Morpurgo (1905-
1961) poète slovène
de langue allemande.