samedi 24 septembre 2022

HÉROÏQUES LICHENS ! LIRE QUELQUES PAGES STIMULANTES DU LIVRE DE K.S. ROBINSON, MARS LA VERTE.

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Quand tant, sur les réseaux, semblent considérer qu’habiter le monde c’est se mettre en scène autour d’une bonne bouteille à la terrasse ensoleillée d’une ville étrangère, tout en se référant à quelque grande figure artistique ou littéraire dont ils ne cherchent au fond qu’à faire publiquement parade, il est bon de rappeler qu’on trouve aussi dans les livres comme dans une relation discrète autant que curieuse à tout ce qui nous entoure, de quoi rendre cette habitation plus authentique et surtout plus réfléchie. Plus nécessaire à partager. Les livres de K.S. Robinson, comme celui dont je l’ai rapproché hier de Peter Weiss, sont des livres qui réclament de leurs lecteurs beaucoup de leur attention et beaucoup de leur temps. Les évoquer dans ce blog pour en susciter la lecture réclame aussi son travail propre. Et même si je suis bien conscient que ce travail ne touchera en définitive qu’assez peu de personnes, cela, que d’autres aussi je sais entreprennent de leur côté, participe d’un esprit de résistance, d’humaine générosité, qu’il importe à tout prix de maintenir. Un seul auditeur suffit à Jean Sébastien Bach avait l’habitude de dire mon ami aujourd’hui disparu, le peintre Rémi Darbre. Oui, surtout si les quelques « auditeurs » que nous avons ne sont en rien des « auditeurs » passifs » et cherchent aussi de leur côté à construire ces nouveaux communs, rendre davantage visibles ces nouveaux imaginaires qui se donnent pour objectif de désaliéner les consciences. Ne serait-ce que des totalitarismes jouisseurs, narcissiques et marchands. 

Aussi j’espère bien que ceux qui passeront par cette page de blog prendront le temps de s’intéresser à ces extraits que nous donnons de Mars la verte, dans lesquels K.S. Robinson célèbre ce miracle de la vie rendue possible par la science à la surface de Mars. Entendons-nous bien. Mars ici est un lieu d’utopie. K.S. Robinson l’aura déclaré à plusieurs reprises : il n’est pas question pour lui de faire de la planète rouge un territoire de substitution pour des habitants de la Terre qui auraient fini par rendre leur propre planète invivable. Le processus de terraformation qu’il imagine à l’œuvre sur Mars n’a rien de vraisemblable étant données les caractéristiques propres de cette planète. Si c’est pour lui de l’ingénierie, c’est d’abord une pure ingénierie de l’imagination qui a toutefois l’avantage de lui permettre de reposer sur des bases nouvelles les questions d’une vaste écologie du vivant comme d’une analyse plus radicale de la mise en place d’une organisation sociale et politique plus responsable et attentive aux aspirations légitimes de chacun.

Dans le dernier ouvrage qu’il vient de publier, en mai 2022, aux Etats-Unis, High Sierra, il célèbre d’ailleurs son amour du local, d’un environnement ramené à ses composants naturels fondamentaux[1], ce qui ne l’empêche pas par ailleurs de continuer à voir dans la science et l’emploi de diverses technologies un moyen susceptible d’être intelligemment utilisé pour résoudre certains des défis auxquels nous nous trouvons confrontés.

C’est pourquoi parmi la somme de tous les extraits que j’ai pu juger possibles, j’ai fini par choisir ceux qui concernent ces héroïques lichens qu’une manipulation d’un des personnages principaux du livre, Sax Russell, dont le prénom est aussi l’abrégé de celui d’une plante que j’essaie de faire vivre chaque printemps dans l’ombre de mon petit jardin de ville, a conduit à se propager quand même dans ce milieu hostile. Affirmation de la puissance de la vie. De l’inépuisable inventivité de ses formes. Et pourquoi pas comme le dirait Francis Hallé de leur intelligence. J’aime quand ce mot ne se réfère plus uniquement aux brillantes variations de cerveaux déconnectés de l’impérieuse expressivité et de l’inquiète franchise du vivant.



[1]«  I hope that the book can inspire people to pay attention to simply being outdoors, the sky, the trees, walking—things that can be done anywhere. Some parts of the Sierra experience are very specific to the Sierras. Others are specific to simply being outdoors. I hope that people reading the book who will never get to the High Sierra will be thinking, “Well, that sounds like a good range. I wonder about my local hill—it’s got rocks, it’s got trees, it’s got sky and clouds, weather.” I hope it inspires them to find pleasure in outdoorness and the physical world, especially in this age of the internet and younger generations that are very often caught in their screen reality, to get out into that third dimension. » K.S. Robinson sur High Sierra, ouvrage non fictif qui évoque son attachement à sa région du Colorado.

 

 

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