Je n’imaginais certes pas, l’an dernier, lorsque j’indiquais que le Prix des Découvreurs 2019-2020 ne pourrait pas être attribué que j’aurais à renouveler aujourd’hui, en avril 2021, cette annonce.
C’est pourtant la triste réalité. La fermeture prématurée des établissements scolaires, jointe aux conditions particulières imposées par la pandémie – je pense en particulier à l’instauration des demi-groupes en lycée - ont finalement empêché dans la plupart des classes qui s’étaient inscrites en début d’année à notre opération, qu’elle aille jusqu’à son terme. Trop de rencontres, dont beaucoup programmées entre mars et mai, ont dû encore une fois être annulées. Et la plupart des séances finales au cours desquelles les jeunes avaient à exprimer leur choix n’ont pas pu se tenir. On nous promet une réouverture des collèges et des lycées le 3 mai. Mais si cette date n’est pas repoussée, ce que beaucoup quand même anticipent, les premières semaines, notamment en lycée, seront occupées par des rattrapages, des contrôles, qui réduiront encore plus le peu de temps actuellement laissé disponible pour les activités culturelles et artistiques.
Le 18 mai, en partenariat avec nos amis du Marché de la Poésie, nous devions remettre officiellement à Boulogne-sur-Mer, le 23ème Prix des Découvreurs et savoir qui succèderait à Pascal Commère, Valérie Rouzeau, Ariane Dreyfus, Ludovic Janvier, Mohamed Dib, Olivier Barbarant, Eugène Savitzkaya, Anize Koltz ainsi qu’une bonne dizaine d’autres dont on retrouvera ici la liste. Nous nous faisions une fête, avec le concours de la Ville de Boulogne dont le soutien ne s’est jamais démenti, de proposer ainsi à une centaine de jeunes parmi les plus impliqués dans notre opération, de découvrir à côté de ce lauréat deux poètes à mon sens remarquables, Séverine Daucourt-Fridriksson accompagnée de ses deux musiciens et Milène Tournier qui devait à coup sûr figurer dans la prochaine édition de notre prix. Tout porte aujourd’hui à penser que nous devrons comme l’an passé renoncer à cette perspective.
Je ne peux que reprendre maintenant exactement les mots qui m’étaient venus en avril 2020, suite à notre premier confinement. Difficile encore une fois effectivement de nous remettre à préparer l’édition à venir du Prix des Découvreurs. Un quart de siècle déjà que nous nous sommes lancés, parmi les tout premiers, dans cette aventure de faire lire la poésie qui s’écrit de leur temps, aux jeunes des écoles, avec la perspective de leur faire ressentir la nécessité profonde, pour les humains que nous sommes, de relancer toujours, par toutes les ressources de notre savoir, de notre sensibilité et de notre imagination, la relation fondamentale que nous entretenons, par la parole, avec la vie.
La façon dont nous voyons aujourd’hui que notre action est un peu partout reprise nous inciterait presque à mettre désormais un terme à l'entreprise, n’était le désir de ne pas laisser ainsi le dernier mot aux puissances mortifères que nous avons toujours tenté, dans notre domaine propre, avec les moyens qui nous ont été donnés et les ressources personnelles que nous avons pu mobiliser, de repousser. Notre objectif, ne nous le cachons pas est profondément politique et non pas culturel. Ne visant à rien moins qu’à faire habiter le plus tôt et le plus largement possible, par chacun, notre maison commune de parole. Mais de parole vraie. Ouverte. Et si possible réflexive.
Nous donnons donc encore une fois rendez-vous dans les semaines qui vont suivre à nos amis enseignants dont nous continuons d’espérer qu’ils auront, plus encore qu’hier, à cœur de s’interroger sur les contenus, le sens et les modalités de ce qu’il leur appartient de transmettre aux jeunes qu’ils ont pour mission d’aider à se construire et d’éveiller. Il y aura de plus en plus pour eux à inventer. Á trouver. Dans de nombreux domaines, bien entendu. Mais surtout, croyons-nous, dans celui essentiel, de la parole. Dont nous savons à quel point elle oriente toujours l’action, bonne ou mauvaise, des hommes.
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