Certes, au final,on m’objectera toujours bien des choses mais le fait est que je reçois de plus en plus d’ouvrages de poésie écrits par des femmes. Et alors qu’à l’origine du Prix des Découvreurs, il y a quelque vingt-cinq ans, nos sélections s’employaient à accorder une place encore exagérément belle aux hommes, ces derniers ont cessé aujourd’hui d’être majoritaires. Et je constate que la plupart des voix nouvelles que poussent mes collègues sont de plus en plus désormais des voix de femmes. En témoignent ces cinq ouvrages découverts à mon retour de vacances que j’ai rassemblés sur la photo devant un arrière plan de Constable. Manière pour moi de faire écho à ce titre d’Ariane Dreyfus, Nous nous attendons, et tout particulièrement à cette magnifique invite qu’on y lira : « le ciel/ Et la pente// Disent « Viens ! » aussi fort l’un que l’autre ».
Tout aussi significatif, d’ailleurs, ce constat que sur les quatre premières publications annoncées pour la nouvelle collection de poche[1] que lancent les fourmillantes éditions LansKine, trois sont des reprises d’œuvres de femmes qui se voient ainsi accorder un beau supplément de reconnaissance et de légitimation.
Il n’est pas inutile non plus de signaler qu’on est loin avec ces ouvrages du caractère sentimentalisant ou comme le dirait Witold Gombrowicz, « cucullisant », que la paresse de nos esprits continue d’attacher à la représentation qu’elle se fait de l’écriture dite féminine. Personnellement je ne suis pas bien certain qu’on puisse vraiment définir un jour le propre de ces écritures. Qui me semblent tellement diverses. Même si j’admets bien évidemment qu’on ne puisse écrire, mais écrire vraiment, qu’à partir de son être propre. Toutefois, avant d’être femme, ou russe, comme l'affirmait Marina Tsvetaeva, n’est-on pas surtout un être humain vivant. Avec en soi la puissance de brouiller, bousculer sinon briser toutes les catégories. Dissoudre toutes les parois qui voudraient nous enserrer[2]. Pour transformer finalement tous les points en virgules[3]. Sans jamais s’arrêter. Ni homme à l’arrivée, ni femme : poète, artiste, architecte de sa propre vie, tout simplement.
[1] Représentée sur la photo par les livres de Laure Gauthier et de Florence Pazzottu.
[2] En clin d’œil à la formule de mon amie Christiane Veschambre à propos du livre de Florence Pazzottu.
[3] Et en clin d’œil cette fois au récit de Samantha Barendson.Comme à celui de Laure Gauthier. Qui sont un peu des traversées. Ainsi que l’est aussi et d’une autre manière le texte de Sereine Berlottier avançant « escortée par K. » vers des chambres où elle aura elle aussi « à apprendre quelque chose au sujet de la peur ».
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