
Ceux qui suivent régulièrement
notre blog savent que nous apprécions depuis longtemps l’œuvre d’Etienne Faure.
Nous le retrouvons avec plaisir dans la suite de ses 16 Séries parisiennes,
sous-titrées Vues de quartier où fidèle à ses habitudes il entraîne, à
différentes allures de phrase et de pensée, son lecteur. Ici Côté Seine,
là Côté rue avant de passer Côté cour, puis ciels, puis sol
et même Côté mains et de repartir Côté bar et chambre et cage
et parc et gare… sans oublier ce Côté voix où sont
rassemblées des évocations de Follain, Guillevic, Réda, Stéfan, Goffette et
Vaché. Comme toujours, le pittoresque de
la notation passe par un travail de syntaxe qui tient de l’orfévrerie sans que
cette attention constante au rythme, à la puissance aussi d’évocation du mot, ne
bride la sensibilité. Le vif l’emporte même s’il faut parler des morts. Du
disparu. Allez ! Ces Séries parisiennes qui se développent à la
rencontre du circonstanciel et de l’intemporel d’exister, de l’humain, trop
humain et de tout ce qui, sous lui, sur lui, à ses côtés ou loin, le déborde, sont
encore une réussite.
DEUX EXTRAITS DE CÔTÉ
GARE
Les ombres
transies font cercle autour d'une chaufferette, apaches plantés au cœur de la
gare, plein nord, offrant les mains à l'âtre, au bon feu qui projette,
électrique, sur les peaux rouges la paix d'une flamme fixe.
Statique
autant qu'un arbre adossé, je rêve, attendant l'autre — replonge le nez dans un
livre inodore, elle ne vient pas ou alors rien, prenant racine des yeux dans
l'incessant mouvement des corps vitement qui se croisent — les jours sont brefs
— par-dessous, par-dessus les dalles, à tout âge issus du sol, hissés dans les
trains, pour regagner par voie de surface un peu le jour.
devant
l'âtre électrique
Bon, ce n'est
pas tout d'avaler le noir au matin l'un dans l'autre, il va falloir affronter
le jour et renouer de la main ce que la nuit délace : bonjour, s'enfler
d'entrain, de transports cheveux triés, peau désherbée, œil de rechange,
entrer, sortir de la ville par la gare, emprunter le passage souterrain puis
resurgir, traits tirés, tête en transit.
La lente
fourmilière abandonne le sang des jambes, demain nous guide à froid sur les
trottoirs qui s'échauffent au soleil du matin, soleil, levain des foules.
la ruée
vers l’ordre