Giovanni di Paolo, Inferno, école toscane du XVème siècle |
Sunt lacrimae rerum ![1] Peut-être qu’en effet comme s’écrie Enée découvrant à Carthage une fresque évoquant les divers épisodes de la guerre de Troie, les œuvres d’art, pourvu qu’on y reconnaisse aussi des traces de sa propre vie, de ses propres angoisses, des drames qu’on aura vécus, sont les larmes des choses, bien plus en fait qu’une simple occasion de plaisir artistique voire une forme supérieure d’embellissement de la vie. Établissant toute une série de correspondances entre des faits révolus et des situations présentes, des émotions passées et d’autres actuelles, nombreuses en effet peuvent être les œuvres qui possèdent, comme le précise encore Virgile, ce charme mortel de pénétrer l’âme et d’ébranler fortement certaines sensibilités.
C’est ce que nous fait, entre autres choses, comprendre, le tout dernier ouvrage de Christophe Manon, Porte du Soleil, qui sous le prétexte d’une quête des origines, se constitue finalement en récit poétique des tribulations d’un cœur blessé, dépourvu d’espérance, saisi d’une incompréhensible douleur, d’accès violents de rage[2], que son arrivée au soleil de Perugia, berceau de sa lointaine famille, plonge dans l’enfer[3] d’une existence qu’il ne maîtrise plus.