vendredi 22 septembre 2023

À PROPOS DE LIGURIES, ENSEMBLE DE TEXTES D’ITALO CALVINO, PUBLIÉS EN VERSION BILINGUE PAR LES ÉDITIONS NOUS, TRADUITS ET PRÉFACÉS PAR MARTIN RUEFF.

« Si on veut décrire un lieu, le décrire complètement, non pas comme une apparence momentanée mais comme une portion d’espace qui a une forme, un sens et un pourquoi[1], il faut représenter tout ce qui se meut dans cet espace, ce qui obéit à un mouvement ultra-rapide comme ce qui se meut avec une lenteur inexorable : tous les éléments que cet espace contient ou a contenus dans ses relations passées, présentes et futures. C’est dire que la véritable description d’un paysage doit finir par contenir l’histoire de ce paysage, de l’ensemble des faits qui ont lentement contribué à déterminer la forme avec laquelle il se présente aujourd’hui à nos yeux, l’équilibre qui se manifeste à chacun de ses moments entre les forces qui le tiennent ensemble et les forces qui tendent à le désagréger. »[2]

Cette déclaration d’Italo Calvino, en tête d’un des cinq textes en prose qui composent le recueil d’articles qu’entre 1945 et 1975, il a consacrés à sa terre natale[3], si elle témoigne bien de l’ambition et de la largeur de vue avec laquelle leur auteur entreprend de rendre compte de son sujet, n’en montre-t-elle pas aussi toute l’impossibilité ? Comment en effet rendre, avec les seules ressources d’un nombre fini de mots arrêtés à jamais sur la page, l’infinie diversité des éléments qui travaillent sans discontinuer un paysage ? Ne se place-t-on pas ici dans la position de ce fameux personnage du Chef-d’œuvre inconnu, de Balzac, que son désir effréné d’enfermer son modèle dans une forme vivante conduit à ne plus faire apparaître aux yeux de ceux qui la regardent qu’un obscur gribouillage ?  

ANTHOLOGIE DÉCOUVREURS : EAUX-FORTES DE LIGURIE D'ITALO CALVINO.

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mercredi 13 septembre 2023

UNE TOUJOURS PLUS DÉVORANTE EXIGENCE D’AMOUR. ÉRIC SAUTOU ET LE TUEUR EN SÉRIE, JEFFREY DAHMER DANS LE GRAND SAINT VINCENT AUX ÉDITIONS UNES.

 

Léon Spilliaert, Autoportrait, 1908

Difficile de rendre compte du dernier livre d’Éric Sautou, Grand Saint Vincent publié par les éditions Unes, tant le caractère indirect, libre, flottant, le mouvement comme régulièrement suspendu, des flux d’images et de pensées que génère la suite de vers en archipel qui le compose, laissent assez peu voir le fil logique qui les relie, si ce n’est qu’on comprend vite que ce mouvement, cette liberté, en recherche constante sinon désespérée de sens, ne le cherchent pas dans l’espace somme toute rassurant, maîtrisé, des considérations rationnelles mais dans celui bien plus intime et insaisissable d’un sentiment : la conscience éprouvée d’un vide, d’une distance, d’une incompréhension, que rien ne parviendra jamais à combler, ni même à énoncer clairement[1].

vendredi 8 septembre 2023

À PROPOS DE LA REPOSÉE DU SOLITAIRE DE JEAN-PASCAL DUBOST CHEZ REHAUTS.

Albrecht Altdorfer : Saint Georges et le dragon en forêt, détail.
 

 « Présentement, déployer une débauche d’énergie sauvage pour ne pas être un écrivain inoffensif ». Je retiens cette formule de Jean-Pascal Dubost tirée de son dernier livre chez Rehauts, La Reposée du solitaire, présentée comme un ensemble de notes de carnet qui comme il me l’écrit dans le mot qui accompagne son envoi, font entrer dans [son] atelier mental en Brocéliande.

samedi 2 septembre 2023

ANTHOLOGIE DÉCOUVREURS. L’ÉTAT DES CIELS À L’APPROCHE DE LA MER DE JEAN-PIERRE CHEVAIS CHEZ REHAUTS.


 

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RECOMMANDATION DÉCOUVREURS. L’ÉTAT DES CIELS À L’APPROCHE DE LA MER DE JEAN-PIERRE CHEVAIS CHEZ REHAUTS.

Boudin, MuMa Le Havre

« Quel sens a une vie sans rosée ? » C’est par cette épigraphe empruntée à l’auteur autrichien Peter Handke que s’ouvre le livre de Jean-Pierre Chevais, L’état des ciels à l’approche de la mer. Incessante variabilité des ciels versus agitation continue et toujours contenue de la mer, humide miroitement de la vapeur d’eau qui se condense la nuit à la surface décolorée des choses, ce sont dans ces mouvements, ces lueurs, ces commencements et recommencements, qu’il importe de lire, ce qui , me semble-t-il, constitue l’un des ouvrages de poésie les plus purs et les plus poignants de ces derniers mois.